Une définition de la fantasy : peut-on délimiter les frontières du genre ?

La fantasy est un genre extraordinaire : il est tellement vaste, impossible à embrasser d’un seul regard… et ses frontières n’ont à ce jour toujours pas été atteintes ! Sa première apparition est sans cesse remise en question, et peut-être pourrait-on faire remonter ses origines aux premières légendes du monde. Sa définition ne met personne d’accord, et pour chaque proposition, on pourrait trouver de nombreuses exceptions ; pourtant, tout le monde visualise avec plus ou moins de précision ce que l’on entend par fantasy. Histoire d’ajouter ma pierre à cet édifice sans fin, je vous propose ma vision de la fantasy et de ce qui la démarque des autres genres de l’imaginaire.

définir la fantasy

Si l’on se penche sur ce qu’en disent les dictionnaires en ligne, on découvre ceci :

  • pour le Dictionnaire de l’Académie Française, le terme n’existe tout simplement pas ; quant à la fantaisie, autre orthographe parfois donnée au genre, elle désigne au mieux une « œuvre où l’imagination, qui n’est pas strictement soumise au respect de règles propres à un genre, se donne libre cours » : la fantasy serait donc tout ce qui n’est pas déjà un genre codifié
  • pour le Larousse, la fantasy se pare immanquablement d’une « atmosphère d’épopée », se mélange au fantastique et est synonyme d’heroic fantasy. C’est une vision que je ne trouve pas complètement erronée en soi, mais qui demeure à mon sens datée, et qui ne prend pas en compte les évolutions qu’elle a pu connaître ces dernières décennies.
  • le Robert propose une définition qui est peut-être celle des trois qui me convient le mieux : « Genre littéraire dans lequel l’action se déroule dans un monde imaginaire peuplé d’êtres surnaturels, mythiques ou légendaires ». Je trouve que cette proposition laisse beaucoup de place à tout ce que la fantasy peut être, aussi bien en termes de ton que de thématiques.

Pour ma part, je retiens particulièrement la proposition de Gillian Brousse dans son livre Voyage au cœur de la Science-Fiction (aux éditions Noir d’Absinthe) :

« La Fantasy présente l’irrationnel accepté. Le lecteur découvre un autre monde et en admet tacitement toutes les règles, tant qu’elles sont constantes. L’auteur joue avec l’impossible et n’est pas tenu d’offrir des explications. »

Ce que j’aime dans cette définition, c’est qu’elle exclut l’aspect littéral de la notion de surnaturel, pour se concentrer sur le pas de côté que propose la fantasy par rapport à notre monde réel : parfois, le surnaturel n’est pas au cœur de l’intrigue (voire complètement absent), et la fantasy tient alors au fait que l’on se trouve ailleurs, dans un monde simplement différent.

différencier les genres de l’imaginaire

Le Larousse évoque le genre du fantastique dans sa définition, et l’ailleurs que je mentionne ci-dessus pourrait tout autant s’apparenter à un univers de science-fiction. Ces trois sous-genres des littératures de l’imaginaire sont effectivement intimement liés, et si leurs frontières individuelles sont difficiles à établir, il est peut-être encore plus ardu de poser celles qui les différencient les uns des autres… Là encore, de nombreuses propositions existent pour définir les caractéristiques de chaque genre par rapport à ses voisins, notamment celle de Gillian Brousse dans l’ouvrage mentionné ci-dessus, mais voici comment, pour ma part, je les distingue :

→ Dans le fantastique, le surnaturel est présent également, mais sa source n’est pas identifiée : magie, créatures étranges, fantômes… C’est une cause d’inquiétude voire d’angoisse pour les protagonistes, et l’enjeu va être de parvenir à identifier ce surnaturel pour en déjouer la menace. Pour moi, cela permet notamment de différencier ces genres lorsqu’ils prennent tous les deux pied dans notre monde.

→ En science-fiction, l’ailleurs trouve sa source dans la science et la technologie, des éléments au fonctionnement connu et maîtrisé, là où la fantasy incorpore plutôt des éléments que l’on apparenterait à une forme de magie, une force éthérée dont le fonctionnement nous est globalement inconnu. Cette proposition permet par exemple de pencher pour la théorie selon laquelle Star Wars, avec d’une part ses vaisseaux spatiaux et d’autre part sa mythique Force, relèverait donc de la science-fantasy

le principe du « oui, mais »

À partir de ces définitions et des codes que l’on associe à la fantasy, on peut donc jouer au jeu des exemples et des contre-exemples. Le Seigneur des Anneaux (J.R.R. Tolkien) est considéré comme l’archétype de la fantasy, avec son souffle épique et ses différents peuples qui cohabitent ; mais Bertram le Baladin (Camille Leboulanger) est un parfait exemple d’une fantasy aux enjeux minimes, avec la quête strictement personnelle d’un personnage qui n’a que son talent pour le démarquer du reste du commun des mortels. L’Assassin Royal (Robin Hobb) est une fantasy profondément ancrée dans une inspiration médiévale, tandis que Les Lames du Cardinal (Pierre Pevel) prend place sous le règne de Louis XIII. Brandon Sanderson propose de longues sagas passionnantes aux tomes épais comme des parpaings, là où Aurélie Wellenstein se concentre sur des tomes uniques originaux et poignants. Prospérine Virgule-Point et la Phrase sans fin (Laure Dargelos) est une aventure palpitante, fraîche et légère ; Kra (John Crowley) est au contraire un récit lent, très métaphorique, qui pose de nombreuses questions et prend le temps d’y réfléchir.

Si la fantasy demeure complexe à définir et à codifier, je pense que c’est un magnifique indicateur de ce qui en fait sa beauté et son intérêt : elle est vaste et ne cesse de s’étendre, elle explore constamment de nouveaux thèmes, renverse les codes établis pour en créer de nouveaux… En fantasy, il y en a pour tout le monde, pour tous les âges et tous les goûts. Je continuerai encore et encore à le répéter : la fantasy est un genre extraordinaire !

Et vous, quelle définition de la fantasy vous convient le mieux ? Quels exemples et contre-exemples vous viennent en tête lorsque l’on évoque ce genre ?

Magie contre Sourcellerie, et au milieu un Bagage à mille pattes

La magie, c’est de la bouillie pour les chats. Voici la sourcellerie, la puissance thaumaturgique de l’Aube des Temps ! Elle pénètre le Disque-Monde par l’entremise du huitième fils d’un mage (défroqué, oui!). Disons-le tout net : casse-cou. Faudra-t-il compter sur Rincevent pour sauver les meubles ? Il a plus d’un tour dans son sac percé. Il a aussi une équipe de choc, avec le pusillanime Bagage – tellement humain ! – et le subtil bibliothécaire de l’université des mages – tellement simiesque ! Avec Nijel le Destructeur, jeune héros par correspondance, et Conina, la fille du plus célèbre Barbare, par qui tombent les cœurs et les coups. Et, en prime, un séjour inoubliable dans la cité d’Al Khali, sous la houlette du Sériph Créosote.
~ Les Annales du Disque-Monde, tome 05 : Sourcellerie, de Terry Pratchett – L’Atalante
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Et hop, encore un tome de l’univers des Annales du Disque-Monde ! Avec celui-ci, je poursuis le cycle de Rincevent et des mages, et bien qu’il soit toujours très agréable à lire, ça n’est définitivement pas mon préféré.

Si les deux premiers tomes de ce cycle constituaient l’introduction de l’univers, la présentation de ses personnages et de ses spécificités, si les autres tomes introduisaient d’autres cycles avec leurs thématiques propres, j’ai eu la sensation que ce tome 5 revenait sur du pur divertissement. J’ai donc retrouvé ce plaisir simple de lire du Pratchett, avec sa narration si unique et son humour décapant, ces personnages complètement perdus face à des événements qui font un peu ce qu’ils ont envie de faire ; une part de moi regrette juste de ne pas avoir eu davantage à se mettre sous la dent.

Bien sûr, on sent ici toute la portée parodique des Annales du Disque-Monde, qui se moque avant tout des codes de son propre genre : des mages qui perdent tous leurs moyens dès lors que la magie se met à faire ce qu’elle veut, un héros aux bras de crevette qui rêve d’être Conan et une fille de Conan qui rêve d’être coiffeuse… et au milieu de tout ça, un personnage principal toujours aussi perdu, bringuebalé par les événements.

C’est d’ailleurs le seul reproche que je peux adresser de temps à autre à l’univers du Disque-Monde, et qui se ressent particulièrement dans ce tome-ci : parfois, j’ai presque la sensation que les personnages sont là uniquement pour donner corps à la narration, puisque c’est l’univers lui-même qui, après un dérèglement, va faire en sorte que les choses reviennent à la normale. Il en ressort quelque chose d’assez passif, mais qui d’un autre côté permet à l’aspect parodique de prendre toute son ampleur.

Ce tome-ci n’est donc clairement pas mon préféré, mais il en faut bien au moins un ! Cela n’entache pourtant pas mon affection pour l’univers du Disque-Monde, que je continuerai d’explorer avec délectation. Et vous, si vous avez lu quelques tomes de cette série, lequel vous a moins plu ?

Retrouvez d’autres tomes chroniqués et d’autres articles autour du Disque-Monde de Terry Pratchett en suivant le tag Disque-Monde.

Voyage au cœur de la science-fiction : le genre à la loupe

La Science-fiction incarne pour certains le domaine des possibles, alors que pour d’autres elle apparaît comme puérile, car souvent réduite à des stéréotypes éculés et des œuvres non représentatives.
Avec cet ouvrage, nous entendons vous faire (re) découvrir ce vaste genre aux multiples facettes capable comme nul autre de s’interroger sur notre monde.
Nous allons parcourir le temps à la recherche du moment où tout a commencé, rencontrer les précurseurs et les personnalités du genre, nous faufiler au cœur de récits majeurs et explorer ses thèmes de prédilection.
Qui que vous soyez, peu importe où et quand vous existez, vous découvrirez des œuvres qui résonneront en vous.
Alors, respirez un grand coup et accrochez-vous à ce livre, mais n’attachez pas vos ceintures, car là où nous allons, nous n’aurons plus besoin de routes…
~ Au cœur de la Science-Fiction, de Gillian Brousse (avec la participation de Rachel Gali, Wilfried Renaut, Magali Lefebvre, A.F Lune, Morgane Stankiewiez & Laurent Cazuguel) – Noir d’Absinthe
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Ce livre a été reçu et est chroniqué dans le cadre d’un service presse : merci à la maison d’édition pour sa confiance !

Bien que très amatrice des littératures de l’imaginaire depuis toujours, de la fantasy en particulier, je n’étais jusqu’à récemment que peu intéressée par les univers proposés par la science-fiction. C’est pourtant un genre que je me mets à explorer tranquillement, voire à apprécier… J’étais donc ravie de pouvoir découvrir cet ouvrage qui propose de décortiquer le genre, son histoire et ses codes !

De manière assez logique, l’auteur présente la chronologie du genre, remontant assez loin dans ses premières apparitions, puis décortique son évolution au fil des décennies. Il aborde également les thèmes principaux de la science-fiction et ses sous-genres, avant de plonger dans de très nombreux exemples de la littérature, du cinéma et d’autres formes d’expression du genre, musicales et plastiques entre autres. J’ai aimé ce panorama très complet, où les nombreuses références permettent autant aux connaisseur.se.s de retrouver leurs repères qu’aux novices de découvrir de nouveaux titres à explorer.

Au-delà de cette approche, le discours est régulièrement entrecoupé d’articles, qui permettent d’ouvrir une large parenthèse sur un point en particulier, pour lesquels l’auteur confie parfois la plume à un.e autre auteur.rice. Ces apartés permettent d’en apprendre davantage sur une figure de la science-fiction ou sur un univers en particulier, et m’a souvent donné envie d’en découvrir plus ! Tout au long de ma lecture, j’ai bien sûr noté de très nombreuses références à aller explorer plus tard… D’ailleurs, chaque partie se conclut sur une liste de titres conseillés par l’auteur, pratique !

Seule petite ombre au tableau, qui est surtout due aux attentes que j’avais : l’ouvrage s’étend beaucoup sur le cinéma puis sur les séries télé de science-fiction. Je pensais surtout plonger dans les univers littéraires du genre, je ne m’attendais donc pas à ce que ce voyage prenne autant de temps pour explorer les univers de l’audiovisuel. Cela dit, l’auteur propose ainsi une approche beaucoup plus complète, que j’ai eu la bonne surprise de voir étendue jusqu’à des arts auxquels je ne m’attendais pas : les arts graphiques et plastiques notamment, ainsi que la musique.

Ce fut donc une lecture riche et très intéressante, que j’ai picorée avec beaucoup de curiosité. Je pense qu’elle saura plaire autant aux novices qu’aux initié.e.s, par son foisonnement de références et de thématiques abordées. C’est un ouvrage très complet, qui m’a permis une très belle plongée dans ce genre que je connais maintenant bien mieux : je vous le conseille chaleureusement ! D’ailleurs, est-ce que vous connaissez d’autres écrits sur les genres de l’imaginaire ?

Tragédie baryonique, orques de métal et tortue des étoiles

2173. L’humanité se remet progressivement de la grande migration climatique qui a décimé sa population. Le progrès scientifique est au point mort.
Seule perspective possible : mettre la main sur les gisements d’antimatière qui doivent se cacher quelque part dans l’espace. A cette fin, des mineurs d’espace-temps génèrent des trous de ver pour explorer les strates de l’Univers.
Sara et Slow sont ainsi embarquées dans le module Orca-7131. Mais une avarie improbable transforme cette mission de routine en catastrophe. Une expédition de la dernière chance s’organise alors – une tentative de sauvetage qui va peut-être marquer le retour de la denrée devenue la plus rare : l’espoir.
~ La trilogie baryonique, tome 1 : La tragédie de l’orque, de Pierre Raufast – Aux Forges de Vulcain
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Ce livre a été reçu et est chroniqué dans le cadre d’un service presse : merci à la maison d’édition pour sa confiance !

Je connaissais l’auteur par plusieurs de ses précédents titres. J’avais beaucoup aimé le style narratif unique qu’il proposait alors, presque sous forme de poupées russes qui s’ouvrent à la suite des autres, exercé plutôt dans un style contemporain. J’étais donc très curieuse de le découvrir dans ce premier essai de science-fiction !

S’il n’a pas repris ici cette construction narrative particulière, il se dégage malgré tout ce petit quelque chose de raufastien qui m’a beaucoup plu. L’univers de science-fiction qu’il propose ici n’est pas de ces univers complexes, très lointains et complètement différents, ni une version post-apocalyptique de notre univers, plus proche mais traumatisé. À l’opposé de tout ça, l’auteur m’a semblé faire presque une proposition, extrapolée de nos avancées technologiques actuelles et de celles qui pourraient être celles de demain. Il met donc en place atmosphère très réelle, très proche de nous et de notre société contemporaine, mais sans jugement et sans pessimisme appuyé, ce que j’ai trouvé rafraîchissant et très bien mené !

Côté intrigue, là aussi l’auteur propose quelque chose de très tangible, à la hauteur de simples individus à qui il arrive la mauvaise chose au mauvais moment. Bien sûr, les enjeux sont grands, mais il s’agit avant tout de deux humains qui tentent de sauver deux autres humains, et d’encore d’autres humains qui ne peuvent qu’attendre en angoissant… Encore une fois, c’est une simplicité que j’ai trouvée rudement efficace, et qui m’a happée jusqu’au bout !

Mais si simplicité il y a, le roman est loin de manquer de profondeur. J’ai trouvé les personnages très bien construits, avec suffisamment de nuances pour les rendre profondément réels, sans tomber pour autant dans l’exagération de personnages torturés (bien qu’il y en ait un ou deux dont on a très envie de découvrir les secrets…). Avec énormément de naturel, l’auteur profite du cadre qu’il a mis en place pour aborder un certain nombre de thématiques. On parle donc par exemple de la présence des IA dans notre quotidien, de la course à l’avancée technologique ou encore des relations familiales à distance. Là encore, il n’apporte aucun jugement, et se contente de les présenter comme partie intégrante de notre monde, avec leurs problématiques, leurs avantages et leurs défauts…

Bien entendu, la fin de ce premier tome présage de nombreuses conséquences, et je suis très curieuse de découvrir comment les choses vont se développer. En tout cas, cette première excursion de Pierre Raufast au pays de la science-fiction m’a énormément plu, avec une approche que j’ai trouvée très fraîche du genre : il parvient à coller à tous ses codes, tout en proposant une atmosphère complètement différente de tout ce que j’ai pu rencontrer pour l’instant… Je vous conseille donc chaleureusement de foncer découvrir ce premier tome d’une trilogie qui promet de belles choses !

Le Livre des Radieux : une suite toute en superlatifs !

Je me souviens des jours avant l’Ultime Désolation.
Avant que les Hérauts ne nous abandonnent, et que les Chevaliers Radieux se retournent contre nous. Des jours où la magie était encore de ce monde, et l’honneur dans le cœur des hommes. Aujourd’hui nous surveillons quatre personnes. La première est un chirurgien qui est devenu soldat dans une guerre brutale. La deuxième est un assassin qui pleure en tuant. La troisième est une jeune femme dont la robe d’étudiante abrite une âme de voleuse et de traîtresse. La dernière est un prince dont les yeux se sont ouverts sur le passé, tandis que son appétit pour la guerre décroît.
Le monde changera.
Ces quatre personnes sont la clé.
L’une d’entre elles nous aidera. L’une d’entre elles nous détruira.
~ Les Archives de Roshar, tome 2 : Le Livre des Radieux pt.2, de Brandon Sanderson – Le Livre de Poche
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J’ai peut-être attendu longtemps avant de reprendre la lecture de ce second tome, mais il ne m’a fallu que quelques pages pour retrouver mes marques dans cet univers désormais si familier ; et quel plaisir de retrouver ces personnages que j’affectionne tant !

Si ce demi-tome m’a moins fait l’effet wahou qu’ont pu me faire les précédents par leurs nombreuses et inattendues révélations, il n’en reste pas moins absolument époustouflant. Je pense notamment à la dernière partie, qui amène une résolution plutôt extraordinaire ! Elle conclut d’ailleurs magnifiquement toute l’épopée de ces deux premiers tomes, et annonce de très grandes choses pour la suite des événements.

Côté personnages, j’ai l’impression de les voir évoluer de plus en plus vite… Shallan, qui n’avait pourtant pas ma préférence au début, prend de l’ampleur et de la profondeur, et j’aime la voir évoluer au sein des nouveaux enjeux qui s’installent autour d’elle. J’ai moins aimé ce que devient ici Kaladin, qui se perd un peu, attendant patiemment le moment où l’auteur aura besoin de lui pour un retournement de situation… Dalinar, quant à lui, m’inspire de plus en plus de respect et de sympathie, et évolue dans une direction qui me plaît beaucoup.

Sans surprise, j’ai donc retrouvé dans ce demi-tome tout ce que je recherche quand je me tourne vers cet auteur et cet univers : de l’action et des retournements de situation, des mystères et des révélations épiques, des personnages tout en nuances et des destinées qui s’affirment… Je regrette juste les premières lueurs d’un triangle amoureux peu convaincant, mais qu’importe : je me plongerai dans le tome suivant avec toujours autant d’enthousiasme !

Dompteur d’avalanches, une fantasy des alpages

Ditto, quatorze ans, tient lieu de guide à des excursionnistes venus des plaines. Un jour, lors de l’attaque d’un monstre des cimes, il se découvre un don pour déclencher avalanches, coulées et crues. Un don puissant.
Or les écouleurs sont craints et haïs par les montagnards. Bientôt, Ditto se retrouve dans la peau d’un paria et contraint à la fuite. En compagnie d’amis inattendus , il va demander son aide à la Lorlaïe, la nymphe du grand glacier.
Mais le marché que lui propose cette dernière lui paraît inacceptable…
~ Le Dompteur d’avalanches, de Margot Delorme – Les Moutons Électriques
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Ce livre a été reçu et est chroniqué dans le cadre d’un service presse : merci à la maison d’édition pour sa confiance !

Toujours adepte des univers qui s’écartent un peu des sentiers battus, j’ai été ravie de pouvoir découvrir ce roman, dont j’ai pourtant très peu entendu parler.

Dès le début, j’ai été marquée par le ton plus jeunesse que ce à quoi je m’attendais. Rien de dérangeant cela dit : une fois ce fait accepté, on profite du récit qui se déroule… J’ai aussi été frappée par l’ambiance, très bien retranscrite : dans ce petit village de montagne, on entend les cloches des vaches, on voit les habitants avec leurs gilets en peau de mouton, on sent les odeurs du fromage et des pâturages, on aperçoit même quelques marmottes… Couplé avec le format audio, j’ai adoré ce ton de conte montagnard chaleureux et réconfortant.

J’ai également beaucoup aimé l’aspect initiatique de l’aventure dans laquelle est propulsé le personnage principal, Ditto. Alors qu’il se découvre une magie inconnue, tout un univers s’ouvre à lui et se dévoile petit à petit. Au fur et à mesure de sa progression, il fait la rencontre de nouvelles créatures aux pouvoirs inédits, et si j’ai pu trouver brièvement des airs de catalogue à cette succession de personnages, elle souligne bien l’immersion de Ditto dans ce nouvel univers, l’acceptation et l’apprentissage de son nouveau don.

Je déplore malheureusement l’intrigue très linéaire, certes propre au format du récit initiatique, mais où j’ai trouvé la progression presque trop facile pour les protagonistes. Cela dit, l’aspect conte du récit contrebalance très bien ce léger défaut, puisque j’ai finalement adoré suivre ces aventures, m’imaginant au coin du feu tandis que le narrateur relate avec passion chacune des péripéties…

Ce fut donc une agréable découverte, notamment de par son format audio. Cela ne restera malheureusement pas une lecture mémorable pour son intrigue, mais je garderai de bons souvenirs de l’atmosphère profondément montagnarde et chaleureuse qui s’en dégage ; et rien que pour ça, c’est une lecture que je recommande fortement !

Étourdissante exploration de la Maison des Feuilles

En rentrant chez eux un soir, les Navidson – Will, Karen et leurs deux enfants qui viennent à peine d’emménager en Virginie – découvrent qu’une nouvelle pièce a surgi dans leur maison… comme si elle avait toujours été là. Simple inattention ? Canular élaboré ? Mètres, plans et appareils de mesure sont réquisitionnés, et soudain l’explication la plus étrange devient la plus évidente : le foyer des Navidson est plus grand à l’intérieur qu’à l’extérieur.
Très vite, d’autres changements surviennent ; un mur se décale, une nouvelle porte apparaît dans le salon et derrière elle un couloir étroit et obscur. Photoreporter de renom et aventurier intrépide, Will s’y risque un soir mais, manquant de se perdre dans ce qui s’avère être un dédale immense, décide de mettre sur pied une équipe d’explorateurs chevronnés, afin d’étudier ce passage qui paraît sans fin et qui, très vite, se révèle l’être pour de bon.
~ La Maison des feuilles, de Mark Z. Danielewski – Monsieur Toussaint Louverture
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Comment parler de ce livre ? S’il en est un que l’on peut largement qualifier d’O.L.N.I. (Objet Littéraire Non Identifié), c’est bien celui-ci ; et rien qu’un coup d’œil entre ses pages suffit à en convaincre. Je dois reconnaître qu’il m’intriguait autant qu’il m’impressionnait, mais je suis ravie de m’être lancée et d’avoir vécu cette expérience de lecture à nulle autre pareille.

Ce roman raconte un labyrinthe, et il en est un lui-même. Autour du récit des événements centraux viennent s’encadrer deux couches de récits, l’un très analytique, l’autre plus narratif. L’un comme l’autre sont déconcertants, dans leur côté à la fois fascinant et profondément lourd à lire. L’analyse, proposée par Zampano, porte sur le film des Navidson dans lequel ils explorent leur maison, auquel il apporte une analyse universitaire parfois très poussée, et sur des sujets scientifiques très variés : la physique du son, l’architecture, le cinéma… Le style est donc assez fastidieux, mais apporte parfois des réflexions que j’ai trouvées passionnantes. Le second récit, quant à lui, est celui de Johnny qui découvre les notes de Zampano. J’ai eu beaucoup moins de sympathie pour ce personnage et ses errances (ceux qui l’ont lu auront le jeu de mots), principalement centrées autour des considérations malsaines qu’il a pour chacune des femmes qu’il croise…

Le récit des Navidson est, curieusement, aussi central qu’accessoire. C’est lui qui motive chacune des couches de ce récit, et ça n’est pourtant pas celui qui occupe la plupart des pages… Cette partie de l’intrigue avance donc lentement, et prend le temps de nous plonger dans une ambiance sombre et pesante, parfois presque horrifique, où les notes de Zampano et de Johnny agissent en voix-off tandis que les scènes s’étirent autour de nous. Ce récit nous entraîne toujours plus loin dans les noirceurs inexpliquées de la maison, tandis que la mise en page du livre s’adapte, s’intensifie, ou nous laisse face au vide, à l’écho de quelques mots laissés en suspens…

Attention : ça n’est pas un roman à intrigue, mais entièrement un roman à ambiance, par laquelle il faut accepter de se laisser porter. Dans la maison, le rythme est bancal, tantôt effréné, tantôt hors de toute temporalité – un effet qui est d’ailleurs accentué par les différents récits encadrés. La mise en page est l’une des plus extravagantes que j’ai pu lire : même en tant que lecteur, il faut chercher son chemin… La fin m’a beaucoup plu, bien qu’elle soit elle aussi assez déconcertante ; quelque part, j’ai trouvé que c’était un beau pied de nez à toutes ces histoires vues et revues de phénomènes fantastiques qui trouvent leur résolution après une enquête haletante…

Ce fut donc une expérience de lecture extraordinaire, mais que je ne peux malheureusement pas recommander à tout le monde. Par contre, si vous êtes à la recherche d’un récit profondément original par lequel vous laisser porter, n’hésitez pas une seconde de plus : entrez dans la Maison des feuilles…

Tolkien conteur : d’une anecdote à l’épopée de Roverandom

Le jeune Michael Tolkien a perdu son jouet fétiche, un petit chien de plomb. Pour le consoler, son père imagine un conte extraordinaire. Celui du jeune chiot Rover qui, pour s’être montré insolent avec un magicien, est transformé en minuscule jouet. Une nuit, Cendré le goéland l’emporte vers la lune. Rover y découvre alors le Lunehomme et le Lunechien, le Dragon Blanc et son nouveau nom : Roverandom.
~ Roverandom (lu en V.O.), de J.R.R. Tolkien – Harper Collins
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Si vous vous êtes déjà penché.e.s sur ce court récit de l’illustre J.R.R. Tolkien, vous aurez certainement entendu parler de son contexte de publication : en vacances sur la côte anglaise, l’un de ses fils égare son jouet en forme de chien, et Tolkien décide de le réconforter en inventant au jouet une histoire remplie de péripéties !

Je pense qu’il est important de connaître cette anecdote au moment d’entamer la lecture de Roverandom, puisqu’elle explique certains éléments qui, sinon, peuvent à mon avis paraître hors de propos ou trop peu approfondis. Le rythme est lui aussi un peu particulier, alternant entre aventures effrénées et longs passages tranquilles : il résulte je pense de l’écriture épisodique de l’auteur, qui avançait au fil de son inspiration et qui n’a ensuite que très peu retravaillé ce texte. Enfin, j’ai retrouvé dans la narration de Roverandom l’oralité que j’avais adorée dans Le Hobbit, et qui est ici encore plus marquée : si on tend bien l’oreille, on peut presque entendre la voix de Tolkien lui-même lorsqu’il lit chaque épisode à ses enfants installés autour de lui…

J’ai beaucoup aimé retrouver ce qui fait, au fil de ses récits et poèmes, l’imaginaire de Tolkien : un mélange de conte, de mythologie et d’éléments qui lui sont propres. J’ai repéré plein de liens avec son univers de la Terre du Milieu, et j’ai découvert d’autres univers et personnages que j’aurais adoré explorer davantage, notamment le monde de la Lune, son Lunehomme et son Lunechien, Psamathos le sorcier…

Cette édition en V.O. est accompagnée, en plus d’une introduction passionnante, de tout un ensemble d’illustrations, que j’ai adoré découvrir et fur et à mesure du texte. J’aime beaucoup l’ambiance que dégagent en général les illustrations de Tolkien, avec ce dessin imparfait et cette palette de couleurs si particulière, et je trouve que ça rajoute beaucoup à l’expérience de lecture de découvrir les deux éléments ensemble comme ce fut le cas ici.

Que vous ayez déjà découvert l’univers de la Terre du Milieu ou non, je vous conseille chaudement la découverte de ce court texte ! Il n’est pas exempt de défauts, mais il est rempli de cette magie « simple » du conte, et propose un voyage doux et dépaysant à souhait. Et vous, vous l’avez lu ? Quels autres écrits de l’auteur avez-vous déjà découverts ?

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Mortimer, l’ordre des choses et les choix de carrière

Mortimer court à travers champs, agitant les bras et criant comme une truie qu’on égorge. Et non. Même les oiseaux n’y croient pas. « Il a du coeur », fait le père adossé contre un muret. « Dame,c’est le reste qui lui manque », répond l’oncle Hamesh. Mais à la foire à l’embauche, la Mort le remarque et l’emporte sur son cheval Bigadin. Il faut la comprendre : elle a décidé de faire sa vie. Avec un bon commis, elle pourrait partager le travail quotidien, ce qui lui laisserait des loisirs. Un grand destin attend donc Mortimer. Mais… est-ce bien raisonnable ?
~ Les Annales du Disque-Monde, tome 4 : Mortimer, de Terry Pratchett – L’Atalante
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Je reprends tranquillement le rythme de lire ou relire régulièrement un tome du Disque-Monde, j’ai donc redécouvert Mortimer, premier tome du cycle de la Mort !

Même si le cycle des sorcières garde ma préférence, celui de la Mort n’est pas loin derrière. Ce personnage universel et intemporel y est confronté à la vie, à l’existence, à l’humanité, et à ce qui les rendent intéressantes et importantes (ou non). Sans cesse en décalage avec les codes de la société, la Mort est l’occasion idéale pour l’auteur de mettre le doigt sur les absurdités de notre monde ; tout en rappelant que, même si elle ne fait pas toujours sens et si elle prendra fin un jour, la vie a toujours quelque chose à apporter.

C’est cette double inéluctabilité qui est au centre de l’intrigue de Mortimer : celle de la mort et celle de la vie. Est-elle menée par nos choix ou pré-écrite dans notre destinée ? Peut-on la modifier, et quelles en seront les conséquences ? Au-delà de ces vastes questionnements existentiels, le roman aborde aussi le notion de morale et, en quelque sorte, de la conscience professionnelle : faire son travail, dont l’importance est primordiale à l’équilibre du monde ? Ou faire ce qui nous semble juste ? Peut-être est-ce la mission confiée qui est la plus juste, même si elle n’en a pas l’air au premier abord ?

Au-delà de ces thématiques passionnantes, j’ai adoré retrouver la narration si particulière et si délectable de Pratchett. Mortimer est un personnage attachant, qui évolue énormément au fil du récit et qu’il est plaisant de voir se développer et prendre de l’assurance. Les événements finaux promettent de grandes choses d’ailleurs, que j’ai hâte de retrouver dans les tomes suivants !

Cette relecture est donc un franc succès : elle a renouvelé mon affection pour le personnage de la Mort, et me donne très envie de me plonger dans les autres tomes de ce cycle ! Et vous, aimez-vous ce cycle de la Mort dans les Annales du Disque-Monde ?

Retrouvez d’autres tomes chroniqués et d’autres articles autour du Disque-Monde de Terry Pratchett en suivant le tag Disque-Monde.

Vers de nouveaux horizons avec les Aventuriers de la Mer

Les vivenefs sont des vaisseaux magiques attachés par des liens empathiques à la famille qui les possède. Ces navires insaisissables bravent les tempêtes, évitent les récifs, distancent les monstres marins, sèment les pirates… et font l’objet de toutes les convoitises. Le capitaine de la Vivacia, Ephron Vestrit, se meure. Parmi les siens, chacun ourdit complot et trahison pour s’approprier son vaisseau, car une vivenef ne se transmet pas comme un legs ordinaire. Pendant ce temps, d’autres dangers se profiles à l’horizon : les serpents de mer qui infestent les océanes se regroupent, et un ambitieux pirate aspire à unir ses pairs sous un seul pavillon : le sien.
~ Les Aventuriers de la Mer, tome 1 : Le vaisseau magique, de Robin Hobb – J’ai Lu
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Après avoir dévoré et adoré Retour au Pays, cette coute novella de transition entre la première partie de l’Assassin Royal et les Aventuriers de la Mer, j’étais loin d’en avoir eu assez de la plume de Robin Hobb. J’ai donc, tout naturellement, enchaîné sur le premier tome des Aventuriers de la Mer !

Changement de décor total, il a fallu refaire la connaissance de nouveaux personnages et de nouveaux environnements. J’ai réussi à m’attacher dès le début à Théa, jeune fille fougueuse, ainsi qu’à Hiémain, douce âme ballotée par les volontés qui l’entourent. On m’avait prévenue, mais Royal trouve lui aussi son digne successeur dans cette série, avec un personnage qui se hisse déjà parmi les plus haïssables qu’il m’ait été donnés de rencontrer. Les tomes suivants vont s’annoncer éprouvants…

Malgré quelques apartés qui n’ont pas encore complètement fait le lien avec l’intrigue principale, on ne voyage pas encore beaucoup ; certainement pour nous laisser le temps d’assimiler les nouveaux éléments. J’ai d’ailleurs adoré rencontrer les Vivenefs (dont j’ai trouvé le processus d’éveil particulièrement émouvant), et j’ai très, très hâte de les voir évoluer auprès des humains, de leurs conflits et de leurs destins.

Si je devais formuler un tout petit regret, je dirais que la narration interne me manque, pour cet attachement rapide qu’elle apporte envers le personnage principal. Cela dit, l’autrice nous embarque ici auprès de nombreux protagonistes dont les chemins vont s’entrecroiser, il s’agira donc peut-être d’une richesse de la narration qui s’exprimera d’une manière différente !

Quoi qu’il en soit, je suis conquise par ce premier tome, et j’ai très hâte de poursuivre ces nouvelles aventures dans le Royaume des Anciens. Et vous, où en êtes-vous des écrits de Robin Hobb ? Quel est votre personnage favori des Aventuriers de la Mer ?

Retrouver d’autres tomes chroniqués :
L’Assassin Royal – Première époque :
Tome 4 : Le poison de la vengeance
Tome 5 : La voie magique
Tome 6 : La reine solitaire
Les Aventuriers de la Mer :
Retour au Pays : Prélude aux Aventuriers de la Mer