La huitième fille : magicellerie dans le Bélier

Sentant venir sa mort prochaine, le mage Tambour Billette organise la transmission de ses pouvoirs, de son bourdon, de son fonds de commerce. Nous sommes sur le Disque-Monde (vous y êtes ? Nous y sommes). La succession s’y effectue de huitième fils en huitième fils. Logique. Ainsi opère le mage. Puis il meurt. Or, il apparaît que le huitième fils est cette fois… une fille. Stupeur, désarroi, confusion : jamais on n’a vu pareille incongruité. Trop tard, la transmission s’est accomplie au profit de la petite Eskarina. Elle entame son apprentissage sous la houlette rétive de la sorcière Mémé Ciredutemps…
~ La huitième fille, de Terry Pratchett – L’Atalante
>> fiche livraddict

Je continue mon exploration du Disque-Monde avec une relecture de ce troisième tome, le premier du cycle des sorcières que j’aime tant !

Des trois sorcières qui formeront plus tard le coven le plus célèbre du Disque-Monde, on ne rencontre ici que Mémé Ciredutemps, attachante acariâtre, qui pose sur le monde une vision très personnelle. Dans cet univers, elle représente la sorcellerie, ce pouvoir qui repose avant tout sur une bonne dose d’un sens pratique à toute épreuve, y compris parfois celle de la logique elle-même. À cette sorcellerie s’oppose la magie, science occulte et complexe qui s’étudie avec une longue barbe, un chapeau pointu et un certain attachement pour les rituels impressionnants et la tradition administrative. Sur le Disque-Monde, les sorcières sont des femmes, et les mages sont des hommes. Et c’est bien sûr l’occasion ici de questionner le rapport à l’égalité femmes-hommes, et aux conceptions genrées de certaines professions.

J’ai beaucoup aimé la manière dont Pratchett aborde cette thématique : lorsque la jeune Eskarina hérite d’un pouvoir de mage, ce sont non seulement ces mages qui tentent de la remettre dans une « place de femme », mais aussi Mémé Ciredutemps elle-même, qui dans un premier temps considère elle aussi qu’il s’agit là d’une frontière à ne pas franchir. À cela, Pratchett pose un point final : les choses sont comme elles sont, il ne reste plus qu’à s’y adapter au mieux.

Au-delà de cette thématique forte, j’ai une fois de plus apprécié de simplement replonger dans cet univers ! On explore le Disque-Monde au travers d’une autre perspective que lors des deux premiers tomes : on accompagne ici une jeune fille qui ne connaît que les montagnes du Bélier, et une sorcière qui sait très bien pourquoi elle préfère ne pas en sortir. Entre narration burlesque et péripéties toujours plus loufoques, j’y passe à chaque fois un excellent moment, et cette relecture a été un véritable bonheur !

Si jamais vous souhaitez découvrir les Annales du Disque-Monde, vous pouvez commencer par celui-ci : un peu meilleur que les deux premiers tomes, il fait une excellente entrée en matière aussi bien pour le cycle des sorcières que pour l’univers entier. Si vous connaissez déjà le Disque-Monde, je suis curieuse : quel est votre cycle préféré ?

Si vous ne savez pas par où commencer pour découvrir cet univers, découvrez le petit guide d’exploration du Disque-Monde à l’usage de l’aventurier intimidé que je vous ai concocté.
Pour retrouver mes autres chroniques des Annales du Disque-Monde, c’est par ici !

Le Hobbit : Tolkien, raconte-moi une histoire…

Bilbo, comme tous les hobbits, est un petit être paisible et sans histoire. Son quotidien est bouleversé un beau jour, lorsque Gandalf le magicien et treize nains barbus l’entraînent dans un voyage périlleux. C’est le début d’une grande aventure, d’une fantastique quête au trésor semée d’embûches et d’épreuves, qui mènera Bilbo jusqu’à la Montagne Solitaire gardée par le dragon Smaug…
~ The Hobbit, de J.R.R. Tolkien – Harper Collins
>> fiche livraddict

Dès que j’ai repéré cette édition en VO, avec sa jaquette à la sublime illustration cachant un petit livre hardback vert, je j’ai pas pu résister ! Je l’ai pris, et une chose en entraînant une autre, je l’ai commencé…

Parcourant la préface en diagonale, j’ai appris que Tolkien avait lu ce texte à ses enfants alors qu’il travaillait sur son écriture. Que cette anecdote soit vraie ou non, mon imagination s’en est emparée, et tout au long de ma lecture la figure de Tolkien apparaissait, installé au coin du feu avec ses enfants, leur racontant lui-même les aventures de Bilbo et des Nains… J’ai redécouvert la profonde dimension orale de ce texte, qui semble presque avoir été écrit pour la lecture à voix haute : le narrateur s’adresse régulièrement à son lectorat, ou fait des écarts que seul un conteur ferait. J’ai beau avoir écouté ce roman un certain nombre de fois dans sa version audio française (que je conseille chaleureusement, au passage !), j’ai trouvé une saveur particulière à pouvoir lire en Anglais les mots que j’imaginais Tolkien lire à ses enfants…

De manière générale, j’ai énormément aimé me replonger dans le récit de toutes ces péripéties, qui donnent vraiment au roman son format de « conte initiatique ». Plus que tout, je me suis attachée à ce Hobbit sans histoires qui, peu à peu, devient ce qu’il n’a jamais (ou toujours ?) été. Avec cette relecture, j’ai aussi davantage apprécié la différence de caractère entre Bilbo et les Nains, savourant l’humour très anglais du Hobbit face au pragmatisme rustique des Nains.

Malgré une PàL difficile à réduire, Le Hobbit est un roman que je ne rechigne jamais à relire, quelle que soit la version. J’aime énormément l’entièreté de l’univers créé par Tolkien, mais ce roman-là a ce petit quelque chose en plus de chaleureux et de réconfortant, qui fait que je m’y replonge toujours avec un bonheur tout particulier…

Et vous, quel livre vous fait cet effet-là ? Vous avez déjà lu Le Hobbit ?

Retrouver ce livre dans une sélection thématique :
Inspirations automnales

Trois Sœurcières : un Pratchett, ça fait toujours plaisir

Le vent, l’orage et les éclairs… Tout cela dans l’horreur d’une profonde nuit. Une de ces nuits, peut-être, où les dieux manipulent les hommes comme des pions sur l’échiquier du destin.
Au cœur des éléments déchaînés luisait un feu, tel la folie dans l’œil d’une fouine. Il éclairait trois silhouettes voûtées. Tandis que bouillonnait le chaudron, une voix effrayante criailla :
« Quand nous revoyons-nous, toutes les trois ? »
Une autre voix, plus naturelle, répondit :
« Ben, moi j’peux mardi prochain. »
Rois, nains, bandits, démons, héritiers du trône, bouffons, trolls, usurpateurs, fantômes, tous sont au rendez-vous. Shakespeare n’en aurait pas rêvé autant. Ou peut-être que si ? Mais l’avantage du roman par rapport au théâtre, c’est que l’on peut s’autoriser beaucoup, beaucoup plus de personnages. Et même le ravitaillement en vol d’un balai de sorcière !
~ Trois Sœurcières, de Terry Pratchett – L’Atalante
>> fiche livraddict

Ça fait déjà quelques années que je suis tombée dans l’univers de Pratchett, et c’est toujours un bonheur d’en picorer un tome par-ci par-là ! Celui-ci est le tout premier que j’ai lu, celui qui m’a fait tomber amoureuse de l’univers et des personnages de Nounou Ogg et Mémé Ciredutemps… Malgré ça, je gardais assez peu de souvenirs de l’histoire, et quand Guimause a demandé pour son Pumpkin Autumn Challenge de lire un livre qui parle de « sorcière – pièce de théâtre – prophétie – tragédie », vous vous doutez bien que j’ai vu là l’occasion parfaite de m’en faire une petite relecture.

Comme d’habitude avec Pratchett, comme d’habitude avec ses sorcières, ce roman est tout bonnement délicieux. Les sorcières sont géniales, complètement loufoques et bougonnes à souhait, et profondément attachantes. Lorsque l’auteur les met, elles et leur pragmatisme, face à une pièce de théâtre, c’est toute cette magie du théâtre qui est rappelée au lecteur, avec son pouvoir de montrer des mondes entiers sur un simple carré de planches en bois, du carton et quelques bouts de tissu… Bien que je ne connaisse rien au sujet, j’ai d’ailleurs beaucoup aimé les très nombreuses références à l’œuvre de Shakespeare !

Quant au style, je me suis délectée de la narration toujours aussi extravagante, et des petits ressorts scénaristiques toujours aussi inattendus, mais qui sont finalement monnaie courante dans cet univers : je pense par exemple à la résolution finale, dont je ne dévoilerai rien mais qui fera s’étouffer dans leur purée les plus grands professeurs d’écriture…

Si vous ne connaissez pas encore l’univers du Disque-Monde, je pourrais vous faire toute une conférence, entre guide d’approche et propagande, mais je vais me contenter de vous confirmer que ce tome-ci est parfait pour commencer si l’envie vous prend ! Et si jamais vous connaissez déjà, vous avez un tome préféré ? Un personnage favori ?

Si vous ne savez pas par où commencer pour découvrir cet univers, découvrez le petit guide d’exploration du Disque-Monde à l’usage de l’aventurier intimidé que je vous ai concocté !

Retour en Terre du Milieu : relecture intégrale du Seigneur des Anneaux, de J.R.R. Tolkien

Une contrée paisible où vivent les Hobbits. Un anneau magique à la puissance infinie. Sauron, son créateur, prêt à dévaster le monde entier pour récupérer son bien. Frodo, jeune Hobbit, détenteur de l’Anneau malgré lui. Gandalf, le Magicien, venu avertir Frodo du danger. Et voilà déjà les Cavaliers Noirs qui approchent…
C’est ainsi que tout commence en Terre du Milieu entre le Comté et Mordor. C’est ainsi que la plus grande légende est née.
~ Le Seigneur des Anneaux, Intégrale, de J.R.R. Tolkien – Éditions Pocket (2018) – nouvelle traduction de Daniel Lauzon
>> fiche livraddict

Après avoir lu le Seigneur des Anneaux adolescente, j’en ai été tellement marquée que l’univers est toujours resté avec moi, et que j’ai toujours continué d’y naviguer, explorant les films de Peter Jackson, les autres adaptations, les autres écrits de l’auteur, le MMO… Pourtant, je n’ai jamais vraiment relu cette « trilogie originelle », et récemment le besoin s’en est fait urgent ! Profitant d’avoir pu mettre les mains sur la nouvelle traduction, je m’y suis plongée avec délectation.

Au premier abord, cette nouvelle traduction déstabilise : la majorité des noms ont été modifiés, et il faut reprendre ses repères… Mais au-delà de ça et d’une ou deux phrases un peu bancales dans l’introduction, j’ai été plutôt conquise. À vrai dire, je suis loin de connaître la première traduction par cœur, et n’ai pas vraiment cherché à faire la comparaison : j’observe simplement que cette lecture de la nouvelle traduction s’est faite sans accrocs !

J’ai pu constater que le Seigneur des Anneaux, et la Terre du Milieu de manière générale, est resté même aujourd’hui un univers qui me touche particulièrement. Je pense qu’après toutes ces années passées à l’explorer de différentes manières, cette relecture m’a d’autant plus happée : en ayant beaucoup joué au MMO par exemple, je connais très bien certaines régions pour m’y être « promenée » un paquet de fois, et y retrouver les personnages rend leurs aventures d’autant plus réalistes à mes yeux. Il en va de même pour certains peuples, certains pans de l’histoire, qui me sont plus familiers maintenant, et qui ont participé à apporter encore davantage de profondeur à cette relecture.

Encore un moment magique, donc, plongée dans l’univers de J.R.R. Tolkien, et qui m’a fait un bien fou… Et maintenant, je m’attaque (enfin) au Silmarillion ?