Magie contre Sourcellerie, et au milieu un Bagage à mille pattes

La magie, c’est de la bouillie pour les chats. Voici la sourcellerie, la puissance thaumaturgique de l’Aube des Temps ! Elle pénètre le Disque-Monde par l’entremise du huitième fils d’un mage (défroqué, oui!). Disons-le tout net : casse-cou. Faudra-t-il compter sur Rincevent pour sauver les meubles ? Il a plus d’un tour dans son sac percé. Il a aussi une équipe de choc, avec le pusillanime Bagage – tellement humain ! – et le subtil bibliothécaire de l’université des mages – tellement simiesque ! Avec Nijel le Destructeur, jeune héros par correspondance, et Conina, la fille du plus célèbre Barbare, par qui tombent les cœurs et les coups. Et, en prime, un séjour inoubliable dans la cité d’Al Khali, sous la houlette du Sériph Créosote.
~ Les Annales du Disque-Monde, tome 05 : Sourcellerie, de Terry Pratchett – L’Atalante
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Et hop, encore un tome de l’univers des Annales du Disque-Monde ! Avec celui-ci, je poursuis le cycle de Rincevent et des mages, et bien qu’il soit toujours très agréable à lire, ça n’est définitivement pas mon préféré.

Si les deux premiers tomes de ce cycle constituaient l’introduction de l’univers, la présentation de ses personnages et de ses spécificités, si les autres tomes introduisaient d’autres cycles avec leurs thématiques propres, j’ai eu la sensation que ce tome 5 revenait sur du pur divertissement. J’ai donc retrouvé ce plaisir simple de lire du Pratchett, avec sa narration si unique et son humour décapant, ces personnages complètement perdus face à des événements qui font un peu ce qu’ils ont envie de faire ; une part de moi regrette juste de ne pas avoir eu davantage à se mettre sous la dent.

Bien sûr, on sent ici toute la portée parodique des Annales du Disque-Monde, qui se moque avant tout des codes de son propre genre : des mages qui perdent tous leurs moyens dès lors que la magie se met à faire ce qu’elle veut, un héros aux bras de crevette qui rêve d’être Conan et une fille de Conan qui rêve d’être coiffeuse… et au milieu de tout ça, un personnage principal toujours aussi perdu, bringuebalé par les événements.

C’est d’ailleurs le seul reproche que je peux adresser de temps à autre à l’univers du Disque-Monde, et qui se ressent particulièrement dans ce tome-ci : parfois, j’ai presque la sensation que les personnages sont là uniquement pour donner corps à la narration, puisque c’est l’univers lui-même qui, après un dérèglement, va faire en sorte que les choses reviennent à la normale. Il en ressort quelque chose d’assez passif, mais qui d’un autre côté permet à l’aspect parodique de prendre toute son ampleur.

Ce tome-ci n’est donc clairement pas mon préféré, mais il en faut bien au moins un ! Cela n’entache pourtant pas mon affection pour l’univers du Disque-Monde, que je continuerai d’explorer avec délectation. Et vous, si vous avez lu quelques tomes de cette série, lequel vous a moins plu ?

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Mortimer, l’ordre des choses et les choix de carrière

Mortimer court à travers champs, agitant les bras et criant comme une truie qu’on égorge. Et non. Même les oiseaux n’y croient pas. « Il a du coeur », fait le père adossé contre un muret. « Dame,c’est le reste qui lui manque », répond l’oncle Hamesh. Mais à la foire à l’embauche, la Mort le remarque et l’emporte sur son cheval Bigadin. Il faut la comprendre : elle a décidé de faire sa vie. Avec un bon commis, elle pourrait partager le travail quotidien, ce qui lui laisserait des loisirs. Un grand destin attend donc Mortimer. Mais… est-ce bien raisonnable ?
~ Les Annales du Disque-Monde, tome 4 : Mortimer, de Terry Pratchett – L’Atalante
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Je reprends tranquillement le rythme de lire ou relire régulièrement un tome du Disque-Monde, j’ai donc redécouvert Mortimer, premier tome du cycle de la Mort !

Même si le cycle des sorcières garde ma préférence, celui de la Mort n’est pas loin derrière. Ce personnage universel et intemporel y est confronté à la vie, à l’existence, à l’humanité, et à ce qui les rendent intéressantes et importantes (ou non). Sans cesse en décalage avec les codes de la société, la Mort est l’occasion idéale pour l’auteur de mettre le doigt sur les absurdités de notre monde ; tout en rappelant que, même si elle ne fait pas toujours sens et si elle prendra fin un jour, la vie a toujours quelque chose à apporter.

C’est cette double inéluctabilité qui est au centre de l’intrigue de Mortimer : celle de la mort et celle de la vie. Est-elle menée par nos choix ou pré-écrite dans notre destinée ? Peut-on la modifier, et quelles en seront les conséquences ? Au-delà de ces vastes questionnements existentiels, le roman aborde aussi le notion de morale et, en quelque sorte, de la conscience professionnelle : faire son travail, dont l’importance est primordiale à l’équilibre du monde ? Ou faire ce qui nous semble juste ? Peut-être est-ce la mission confiée qui est la plus juste, même si elle n’en a pas l’air au premier abord ?

Au-delà de ces thématiques passionnantes, j’ai adoré retrouver la narration si particulière et si délectable de Pratchett. Mortimer est un personnage attachant, qui évolue énormément au fil du récit et qu’il est plaisant de voir se développer et prendre de l’assurance. Les événements finaux promettent de grandes choses d’ailleurs, que j’ai hâte de retrouver dans les tomes suivants !

Cette relecture est donc un franc succès : elle a renouvelé mon affection pour le personnage de la Mort, et me donne très envie de me plonger dans les autres tomes de ce cycle ! Et vous, aimez-vous ce cycle de la Mort dans les Annales du Disque-Monde ?

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La huitième fille : magicellerie dans le Bélier

Sentant venir sa mort prochaine, le mage Tambour Billette organise la transmission de ses pouvoirs, de son bourdon, de son fonds de commerce. Nous sommes sur le Disque-Monde (vous y êtes ? Nous y sommes). La succession s’y effectue de huitième fils en huitième fils. Logique. Ainsi opère le mage. Puis il meurt. Or, il apparaît que le huitième fils est cette fois… une fille. Stupeur, désarroi, confusion : jamais on n’a vu pareille incongruité. Trop tard, la transmission s’est accomplie au profit de la petite Eskarina. Elle entame son apprentissage sous la houlette rétive de la sorcière Mémé Ciredutemps…
~ La huitième fille, de Terry Pratchett – L’Atalante
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Je continue mon exploration du Disque-Monde avec une relecture de ce troisième tome, le premier du cycle des sorcières que j’aime tant !

Des trois sorcières qui formeront plus tard le coven le plus célèbre du Disque-Monde, on ne rencontre ici que Mémé Ciredutemps, attachante acariâtre, qui pose sur le monde une vision très personnelle. Dans cet univers, elle représente la sorcellerie, ce pouvoir qui repose avant tout sur une bonne dose d’un sens pratique à toute épreuve, y compris parfois celle de la logique elle-même. À cette sorcellerie s’oppose la magie, science occulte et complexe qui s’étudie avec une longue barbe, un chapeau pointu et un certain attachement pour les rituels impressionnants et la tradition administrative. Sur le Disque-Monde, les sorcières sont des femmes, et les mages sont des hommes. Et c’est bien sûr l’occasion ici de questionner le rapport à l’égalité femmes-hommes, et aux conceptions genrées de certaines professions.

J’ai beaucoup aimé la manière dont Pratchett aborde cette thématique : lorsque la jeune Eskarina hérite d’un pouvoir de mage, ce sont non seulement ces mages qui tentent de la remettre dans une « place de femme », mais aussi Mémé Ciredutemps elle-même, qui dans un premier temps considère elle aussi qu’il s’agit là d’une frontière à ne pas franchir. À cela, Pratchett pose un point final : les choses sont comme elles sont, il ne reste plus qu’à s’y adapter au mieux.

Au-delà de cette thématique forte, j’ai une fois de plus apprécié de simplement replonger dans cet univers ! On explore le Disque-Monde au travers d’une autre perspective que lors des deux premiers tomes : on accompagne ici une jeune fille qui ne connaît que les montagnes du Bélier, et une sorcière qui sait très bien pourquoi elle préfère ne pas en sortir. Entre narration burlesque et péripéties toujours plus loufoques, j’y passe à chaque fois un excellent moment, et cette relecture a été un véritable bonheur !

Si jamais vous souhaitez découvrir les Annales du Disque-Monde, vous pouvez commencer par celui-ci : un peu meilleur que les deux premiers tomes, il fait une excellente entrée en matière aussi bien pour le cycle des sorcières que pour l’univers entier. Si vous connaissez déjà le Disque-Monde, je suis curieuse : quel est votre cycle préféré ?

Si vous ne savez pas par où commencer pour découvrir cet univers, découvrez le petit guide d’exploration du Disque-Monde à l’usage de l’aventurier intimidé que je vous ai concocté.
Pour retrouver mes autres chroniques des Annales du Disque-Monde, c’est par ici !

Les Annales du Disque-Monde : petit guide d’exploration à l’usage de l’aventurier intimidé

Grande révélation : je suis profondément passionnée par l’univers du Disque-Monde. Je l’ai découvert il y a déjà pas mal d’années avec Trois Sœurcières, dont je suis tombée raide dingue dès les premières pages. Depuis, j’ai acheté toute la série dans la belle collection de la Dentelle du Cygne chez l’Atalante (en version blanche), je me suis dégotté un T-Shirt reprenant l’une des illustrations de couverture, et je n’ai de cesse de chercher le tome idéal à recommander aux lecteur.rice.s autour de moi. Mais je n’ai pas encore tout lu, loin de là : je savoure.

Face à l’immensité de l’univers, il est facile de se sentir un peu découragé.e d’avance, et de ne pas oser sauter le pas. Pourtant, c’est un univers léger et facile d’accès, à l’humour décoiffant et qui vaut largement le détour ! Alors si vous peinez à y voir clair et que vous aimeriez pourtant vous lancer dans le Disque-Monde, cet article est fait pour vous !

Mais d’abord, c’est quoi ?

Le Disque-Monde, c’est un univers de fantasy imaginé par Terry Pratchett. Comme le nom l’indique, les événements se déroulent sur un immense disque, porté sur le dos de quatre éléphants qui se tiennent sur le dos de la Grande A’Tuin, gigantesque tortue cosmique. On y retrouve des sorcières, des vampires et des loups-garous, des rois et des paysans, la Mort, un Chicard, et plein d’autres choses plus ou moins mystérieuses (ou identifiées). Terry Pratchett explore cet univers loufoque dans près de 50 romans, dont la plupart sont rassemblés sous le titre « Les Annales du Disque-Monde ». Encore assez peu connu, c’est pourtant un univers emblématique de la fantasy britannique, à la fois classique de la fantasy et énorme parodie.

Du coup, on commence où ?

Comme je le mentionnais plus tôt, le Disque-Monde rassemble presque une cinquantaine de tomes, et si ce ne sont pas des pavés, ça représente quand même pas mal de lecture. Mais il y a une chose à bien comprendre : il n’y a pas d’unité narrative entre les tomes, et pas vraiment non plus de chronologie. Chaque tome est une histoire indépendante, et ils peuvent être lus dans le désordre.

Commencer par le tout début : ça peut effectivement être une bonne idée pour avoir les bases. Il faut par contre savoir que, pour contredire ce que je disais juste au-dessus, la première histoire est divisée en deux tomes, La Huitième Couleur et Le Huitième Sortilège. Il est aussi à noter que ce sont pas les meilleurs tomes de la saga : s’ils ne vous ont pas convaincu.e, n’hésitez pas à en tenter un autre !

Avancer par cycles : chaque tome est indépendant, mais on retrouve néanmoins certains personnages qui reviennent de manière récurrente. On a ainsi tendance à les rassembler en « cycles », regroupant les tomes qui, de manière chronologique, suivent un seul et même groupe de personnages. Chaque cycle a ses thématiques propres, ce qui peut expliquer que vous n’accrochiez pas avec l’un alors qu’un autre vous happe dès le début. Mon préféré, c’est celui des Sorcières (d’ailleurs, vous avez remarqué le lien avec mon pseudo ? Viendrait-il de là ? Mystère.) Pour avoir un aperçu de ces cycles, on se réfère en général à ce diagramme, et voici une liste rapide des principaux personnages à découvrir :

  • Rincevent et les mages : un mage plutôt pas très doué et les vieux sages décadents de l’Université Invisible
  • Les sorcières : Mémé Ciredutemps et Nounou Ogg, qui ne se laissent pas marcher sur les pieds par l’ordre des choses
  • La Mort : il est masculin, et il lui arrive d’en avoir marre d’être la Mort
  • Le Guet : la police d’Ankh Morpork, qui mène des enquêtes
  • Moite von Lipwig : un gars qui n’a rien demandé à personne, mais qui vit malheureusement à Ankh Morpork

Choisir au hasard (ou presque) : la méthode que je conseillerais presque, c’est d’y aller au feeling ! Chaque tome aborde avec pertinence et humour un ensemble de thématiques très variées, parfois inattendues, mais toujours aussi bien traitées : on va par exemple de l’opéra à l’Australie, en passant par l’apocalypse, les elfes et le football. Entre autres. Pour cette méthode, vous pouvez donc vous laisser aller à un résumé qui vous tente plus que les autres ; vous pouvez aussi aller voir cette page Wikipedia qui reprend, tome par tome, le cycle auquel il appartient et les thématiques abordées, pour vous permettre d’en repérer un qui vous ferait particulièrement de l’œil !

À noter

J’ai remarqué que les romans plus tardifs ont tendance à avoir des intrigues plus tarabiscotées, contrairement aux premiers, plus directs et faciles d’accès. L’univers du Disque-Monde étant un peu particulier, il s’agit donc, à mon humble avis, d’un paramètre à prendre en compte lors du choix d’un premier livre.

De plus, comme j’ai déjà tenté de vous le faire comprendre, ces romans sont tous très différents les uns des autres : si vous n’avez pas accroché avec l’un d’eux, n’hésitez pas à en essayer un autre !

Dernier point : tous les conseils que j’ai donnés dans cet article n’ont, au final, absolument aucune importance. Si vous voulez lire le Disque-Monde, prenez un tome du Disque-Monde et lisez-le sans vous poser plus de questions : c’est aussi simple que ça !

Si jamais vous tentez l’expérience, n’hésitez pas à m’en parler : quel est le premier tome que vous avez découvert ? Votre personnage préféré ? Dites-moi tout !

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Trois Sœurcières

Trois Sœurcières : un Pratchett, ça fait toujours plaisir

Le vent, l’orage et les éclairs… Tout cela dans l’horreur d’une profonde nuit. Une de ces nuits, peut-être, où les dieux manipulent les hommes comme des pions sur l’échiquier du destin.
Au cœur des éléments déchaînés luisait un feu, tel la folie dans l’œil d’une fouine. Il éclairait trois silhouettes voûtées. Tandis que bouillonnait le chaudron, une voix effrayante criailla :
« Quand nous revoyons-nous, toutes les trois ? »
Une autre voix, plus naturelle, répondit :
« Ben, moi j’peux mardi prochain. »
Rois, nains, bandits, démons, héritiers du trône, bouffons, trolls, usurpateurs, fantômes, tous sont au rendez-vous. Shakespeare n’en aurait pas rêvé autant. Ou peut-être que si ? Mais l’avantage du roman par rapport au théâtre, c’est que l’on peut s’autoriser beaucoup, beaucoup plus de personnages. Et même le ravitaillement en vol d’un balai de sorcière !
~ Trois Sœurcières, de Terry Pratchett – L’Atalante
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Ça fait déjà quelques années que je suis tombée dans l’univers de Pratchett, et c’est toujours un bonheur d’en picorer un tome par-ci par-là ! Celui-ci est le tout premier que j’ai lu, celui qui m’a fait tomber amoureuse de l’univers et des personnages de Nounou Ogg et Mémé Ciredutemps… Malgré ça, je gardais assez peu de souvenirs de l’histoire, et quand Guimause a demandé pour son Pumpkin Autumn Challenge de lire un livre qui parle de « sorcière – pièce de théâtre – prophétie – tragédie », vous vous doutez bien que j’ai vu là l’occasion parfaite de m’en faire une petite relecture.

Comme d’habitude avec Pratchett, comme d’habitude avec ses sorcières, ce roman est tout bonnement délicieux. Les sorcières sont géniales, complètement loufoques et bougonnes à souhait, et profondément attachantes. Lorsque l’auteur les met, elles et leur pragmatisme, face à une pièce de théâtre, c’est toute cette magie du théâtre qui est rappelée au lecteur, avec son pouvoir de montrer des mondes entiers sur un simple carré de planches en bois, du carton et quelques bouts de tissu… Bien que je ne connaisse rien au sujet, j’ai d’ailleurs beaucoup aimé les très nombreuses références à l’œuvre de Shakespeare !

Quant au style, je me suis délectée de la narration toujours aussi extravagante, et des petits ressorts scénaristiques toujours aussi inattendus, mais qui sont finalement monnaie courante dans cet univers : je pense par exemple à la résolution finale, dont je ne dévoilerai rien mais qui fera s’étouffer dans leur purée les plus grands professeurs d’écriture…

Si vous ne connaissez pas encore l’univers du Disque-Monde, je pourrais vous faire toute une conférence, entre guide d’approche et propagande, mais je vais me contenter de vous confirmer que ce tome-ci est parfait pour commencer si l’envie vous prend ! Et si jamais vous connaissez déjà, vous avez un tome préféré ? Un personnage favori ?

Si vous ne savez pas par où commencer pour découvrir cet univers, découvrez le petit guide d’exploration du Disque-Monde à l’usage de l’aventurier intimidé que je vous ai concocté !