Mystère au Caire : qui est ce Maître des Djinns ?

Le Caire, 1912. Vêtue d’un complet trois pièces – un ensemble blanc du plus bel effet sur sa peau cuivrée –, Fatma lisse sa cravate couleur d’or en veillant à exhiber les boutons de manchette scintillant aux poignets de sa chemise bleu nuit. Puis elle pose son chapeau melon sur sa courte crinière bouclée. Oui, Fatma el-Sha’arawi est une redoutable sapeuse. C’est aussi une énergique et compétente enquêtrice du ministère de l’Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles. Et la voici en charge de l’assassinat collectif de la Fraternité d’al-Jahiz par un inconnu qui se prétend… al-Jahiz lui-même, le puissant mystique qui a ouvert la porte de l’Égypte à la magie et aux djinns cinquante ans plus tôt.
Imposture ? Ça ne fait aucun doute pour Fatma. Mais encore faut-il identifier et traquer ce mystérieux terroriste que des pouvoirs inouïs rendent, semble-t-il, invulnérable. Une enquête à tiroirs à l’issue de quoi on dirait bien que notre héroïne devra encore sauver le monde.
~ Maître des Djinns, de P. Djèli Clark – L’Atalante
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Il y a quelque temps, je découvrais P. Djèli Clarke avec ses deux novellas Les tambours du dieu noir et Le mystère du tramway hanté. Les deux univers qu’il proposait alors, des dystopies d’un fort modernisme et d’une profondeur remarquable, ainsi que les personnages et intrigues qu’il y faisait jouer, m’avaient alors complètement conquise. Lorsque j’ai pu rencontrer l’auteur aux Utopiales et en ramener un exemplaire dédicacé de Maître des Djinns, qui prend la suite de sa deuxième novella, j’étais aussi ravie que curieuse de le voir développer son idée sur un roman beaucoup plus long.

Et j’ai effectivement passé un excellent moment ! J’ai retrouvé ce Caire du début du XXe siècle qui m’avait tant plu dans la novella : du fait de la libération des Djinns, la capitale égyptienne est devenue une puissance majeure, et a permis de développer une société moderne peut-être encore plus avancée que les Paris ou Londres de l’époque ; notamment sur la situation des femmes dans le monde du travail ou les relations homosexuelles.

L’ensemble de personnages que l’on suit en est d’ailleurs une parfaite illustration. Centré autour de Fatma, enquêtrice solitaire en costume impeccable et chapeau melon, le roman nous présente également sa coéquipière Hadia, volontaire et pleine de surprises, que j’ai adoré voir prendre de l’assurance au fil de l’intrigue, et Siti, mystérieuse et envoûtante, qui se dévoile progressivement dans toute sa puissance et toute son humanité. C’est un trio que j’ai trouvé très beau, qui peine à fonctionner au début mais qui parvient finalement à trouver son rythme, pour atteindre une complicité qui fait chaud au cœur.

L’intrigue m’a également beaucoup plu. Pour un univers d’imaginaire, j’ai été ravie de découvrir énormément de codes du policier, avec de fréquentes références à l’aspect administratif et procédurier d’une enquête officielle : mandats, analyses scientifiques… Le mélange fonctionne donc très bien, créant une atmosphère doublement captivante : un univers qui se dévoile et une enquête qui progresse ! Je regrette simplement de ne jamais avoir été vraiment surprise. L’auteur propose bien quelques révélations et retournements de situation, mais qui ne m’ont pas chamboulé le cerveau.

Ce fut donc, sans surprise, une nouvelle expérience positive dans l’univers de P. Djèli Clark. Peut-être nous proposera-t-il ensuite un roman qui explorerait sa Nouvelle-Orléans de la fin du XIXe siècle ? Pour ma part, j’adorerais ! En attendant, je ne peux que vous conseiller de découvrir ce qu’il nous offre déjà dans Maître des Djinns.

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