Terremer, cet univers extraordinaire

Terremer est un lieu magique et ensorcelé. Une mer immense recouverte d’un chapelet d’îles où les sorciers pratiquent la magie selon des règles très strictes. On y suit les aventures de Ged, un éleveur de chèvres qui, au terme d’une longue initiation, deviendra l’Archimage le plus puissant de Terremer, mais aussi celles de Tenar, haute prêtresse du temple des Innommables de l’île d’Atuan, de Tehanu, la fille-dragon, et de Aulne le sorcier qui refait chaque nuit le même rêve terrifiant. Autour de la grande histoire gravitent des contes qui enrichissent et explorent ce monde où enchanteurs et dragons se côtoient.
~ Terremer, de Ursula Le Guin – Le Livre de Poche
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Lorsqu’en raison d’une pandémie tout le monde fut invité à rester à la maison, j’y ai vu là l’occasion rêvée de dévorer cette intégrale rassemblant l’ensemble des textes d’un univers emblématique de la fantasy : il y a trois ans, j’ai commencé Terremer, d’Ursula Le Guin. Je n’ai finalement pas pu le dévorer aussi vite que prévu, et j’ai terminé la lecture des derniers textes tout récemment…

Tout au long de cette lecture qui se sera étalée sur plus de trois ans, j’ai pu découvrir un univers d’une densité extraordinaire : les différents textes nous font voyager loin, très loin, au nord, au sud, et par-delà même les limites du monde connu. On rencontre cet univers alors qu’il est tout jeune, et on le quitte bien des siècles plus tard, après être passé entre les mains de bien des hommes… L’autrice a magnifiquement bien rendu les différences entre les lieux et les époques, rendant cette profondeur d’univers d’autant plus tangible : les personnages que l’on suit ont des manières complètement différentes de voir le monde, ce que j’ai senti dans la narration même, ainsi que dans les réactions et les sentiments qu’elle insuffle à ses personnages de manière très crédible. On se trouve dans un univers classique d’epic fantasy, avec des sorciers et des dragons, mais que l’autrice est parvenue à emmener bien plus loin, proposant ainsi quelque chose de très novateur.

Au-delà de l’univers, c’est également par ses thématiques que Terremer se démarque des autres récits de son époque – et même encore aujourd’hui. On retrouve bien, par exemple, la classique quête épique pour empêcher la fin du monde, mais elle se teinte ici de la culpabilité d’en avoir déclenché la cause, et de l’apprentissage de la responsabilité. On y parle du passage de l’enfance à l’adolescence, puis à l’âge adulte et à la vieillesse ; de la manière dont on aspire à différentes choses en prenant de l’âge ; de la condition de la femme, de son rapport au monde, à la magie et aux hommes ; de la vie de couple, de la parentalité, de l’héritage ; des ténèbres du monde, des ténèbres en soi, du monde après la mort… Si le propos est le plus souvent épique, j’ai toujours retrouvé en filigrane de chacun de ces textes des thématiques profondément universelles, qui placent l’humanité au centre de chaque récit, et assoient là aussi l’originalité incontestée de Terremer.

Si j’avais un regret, il tiendrait à la narration particulière de l’autrice : elle raconte avec ton très grandiloquent, très beau et souvent poétique, mais de fait très imagé. Elle prend énormément de détours pour décrire un simple fait, et passe beaucoup de temps dans l’intériorité des personnages davantage que sur le déroulé des actions. Couplé au fait que la dernière moitié des récits, composée de nouvelles qui décrivent les premiers et les derniers temps du monde, ne suive pas du tout la chronologie de l’univers, je reconnais avoir été souvent perdue dans la grande fresque des événements de Terremer. Si j’ai apprécié ce que l’autrice a créé avec cet univers, je n’ai malheureusement pas réussi à être autant impliquée que je l’aurais souhaité en tant que lectrice.

J’ai néanmoins versé ma larmichette en refermant le livre d’un si vaste univers, et je suis curieuse de découvrir l’autrice hors de Terremer ; si vous ne l’avez pas encore découvert, je vous le conseille chaleureusement : c’est un monde tellement riche, nul doute que chacun.e saura y trouver son compte ! Et si vous l’avez lu, qu’en retenez-vous ? Par quoi me recommandez-vous de continuer l’œuvre d’Ursula Le Guin ?

4 commentaires sur “Terremer, cet univers extraordinaire

  1. Hello dearie,
    Bien sûr, Le Guin est mon autrice préférée à 200% alors, je ne pouvais passer outre ta jolie chronique ! Merci d’y avoir si bien reporté la pluralité des thématiques travaillées par l’autrice. Le Guin possédait une intelligence émotionnelle, philosophique et sociologique hors pair – combien je regrette son départ de notre petite planète.
    Au sujet de son style, personnellement, j’y trouve le juste milieu. C’est-à-dire que je suis « aphantasique » et de fait, les auteur.ices aux envolées lyriques et trois pages pour décrire un seul objet… Très peu pour moi ! Néanmoins, Le Guin a cette faculté à me faire « voir » ce qu’elle dépeint et je trouve dans son écriture la vie à profusion. Tout y est animé, vivant, presque sentient. Et je t’avouerais que je trouve ça fou de travail et de maîtrise !
    Ses romans de SF te conviendront certainement mieux ; le ton y est plus rugueux et moins dans l’esprit du conte poétique.
    Je t’embrasse ma biche

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